UN MÉTIER POUR LES ANIMAUX = Historien (avec Eric Baratay)
Éric Baratay est un historien très spécial : il travaille sur l’histoire… des animaux. Hé oui, c’est encore peu connu, mais c’est un travail scientifique – et passionnant ! Dans ses recherches, il s’est par exemple intéressé à l’histoire des animaux pendant la Première Guerre mondiale, ou encore à celle des chats à travers les siècles. Comment faire des animaux les héros de leur propre histoire ?
Bonjour Éric ! Pourquoi avoir décidé de travailler sur l’histoire des animaux ?
C’était en 1985, j’étais étudiant. Comme j’aimais beaucoup les animaux, je me suis dit : « Pourquoi ne pas travailler sur leur histoire ? » D’abord, j’ai travaillé sur l’histoire des animaux par rapport aux humains (par exemple, comment ils étaient utilisés pour les travaux des champs au siècle dernier). Ensuite, je me suis dit qu’on savait déjà pas mal de choses sur la manière dont les humains considéraient les animaux, mais qu’on ne savait rien sur l’histoire des animaux eux-mêmes.
Je voulais écrire l’histoire des animaux, mais… de leur point de vue, à eux ! À l’époque, certains autres historiens disaient qu’on ne peut pas connaître le point de vue des animaux, car ils sont différents de nous. Pourtant, les paysans du XVIIe siècle aussi sont très différents de nous, et nous essayons bien de comprendre leur histoire !
Mais comment faites-vous pour deviner le point de vue des animaux du passé ?
Il ne s’agit pas de deviner, ni d’inventer : il faut trouver des preuves. Pour ça, on a besoin des sciences qui travaillent sur les animaux, comme l’éthologie (l’étude des comportements des animaux), la médecine vétérinaire ou la génétique. Grâce à ces connaissances, on va étudier les documents laissés par les humains : le texte qu’un homme a écrit sur son chien il y a un siècle, ou des documents militaires qui racontent l’utilisation des chevaux durant la Première Guerre mondiale, peuvent être mieux compris grâce à nos connaissances sur les animaux.
Ça veut dire que la science peut nous permettre de connaître ce que ressentaient les animaux ?
Oui, il faut essayer de sortir de sa peau d’humain (en imagination, bien sûr !) pour entrer dans la peau de l’animal. Par exemple, si je dois écrire l’histoire d’un chat, je dois penser : « Qu’est-ce que ça fait d’être un chat ? » Aujourd’hui, on sait que ces animaux ont un odorat plus développé que nous, qu’ils sont bien plus sensibles aux vibrations… Il faut essayer de retrouver ce qu’ils ont vécu !
Vous avez écrit des Biographies animales. Parmi toutes ces histoires, laquelle vous a le plus touché ?
C’est probablement l’histoire de Zarafa, la girafe de Charles X : elle a été capturée au Soudan en 1826 puis amenée, à pattes et en bateau, jusqu’à Paris. Ce qui m’a intéressé, c’est d’essayer de comprendre ce qu’il s’est passé pour elle dans ce voyage : comment la capture a pu la stresser, mais aussi comment elle a pu créer des relations avec les autres animaux auprès d’elle, notamment les vaches qui voyageaient avec elle. À travers son histoire, on imagine aussi la souffrance des deux autres girafes qui n’ont pas survécu à ce voyage…
Du coup, est-ce que raconter l’histoire des animaux vous permet de les aider ?
Oui, c’est important pour se rendre compte qu’il y a des vies, et des histoires, aussi importantes que les nôtres. Et raconter l’histoire des animaux, c’est aussi apprendre à mieux les connaître. Par exemple, on sait aujourd’hui que les attitudes des animaux évoluent : au XIXe siècle, les chats miaulaient sans doute beaucoup moins qu’aujourd’hui pour différentes raisons. On en sait plus aussi sur la manière dont les événements des humains, comme les guerres, ont eu des conséquences pour les vaches ou les chevaux !
On ne parle pas souvent des animaux dans nos cours ou dans nos manuels d’histoire. Pourquoi ?
L’histoire des animaux est encore très nouvelle, donc on en entend encore peu parler à l’école… Ça change petit à petit ! Certains enseignants abordent le thème des animaux sur un seul cours, ou font attention à évoquer régulièrement les animaux dans leur cours. Mais le changement peut prendre du temps : aujourd’hui, la population est plus à l’écoute des animaux qu’avant. Et elle le sera encore plus dans 10 ou 20 ans !
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